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Garantie décennale et autres cas d’indemnisation pour les recours en matière de

Publié le 14/02/2024

 

L’assurance dommages-ouvrage et l’assurance décennale, sont deux contrats d’assurances de travaux construction aux effets identiques et rendus obligatoires par la loi Spinetta. Ces deux contrats d’assurance sont des garanties légales de construction applicables pendant 10 années suivant la réception des travaux commandés. Fanny QUILAN, responsable juridique chez AXO – L’immobilier Actif, nous aide à en comprendre les tenants et aboutissants.

La garantie décennale étant de champ d’application plutôt stricte, d’autres cas d’indemnisation peuvent être sollicités dans le cadre d’un recours en construction (A). Des problèmes juridiques et de solvabilité sont souvent constatés lorsque les travaux ne sont couverts par aucune assurance. La loi particulièrement sévère oblige à redoubler de vigilance (B). 

A/ Garantie décennale et autres cas d’indemnisation pour les recours en matière de construction

Les travaux de nature décennale, les « ouvrages » concernés par l’obligation de souscrire une assurance, sont ceux qui touchent : aux fondations ainsi qu’à l’ossature du bien ; à la viabilité du bien (réseaux, assainissement) ; à l’accès et à la voirie du bien ; à la réalisation de travaux avec fondation (ex : véranda, piscine, terrasse.) ; ainsi qu’aux éléments d’équipement indissociables des travaux mentionnés (canalisation, plafond, plancher, chauffage central, huisseries, installation électrique). 

1/ Les souscripteurs

La seule différence entre l’assurance dommages-ouvrage et l’assurance décennale réside dans la personne même de leur souscripteur. 

  1. a) Pour les ouvrages de nature décennale, l’obligation pour le professionnel (le maître d’oeuvre) d’être titulaire d’une assurance décennale est libellée à l’art.L.241-1 c.ass indiquant que : « Toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennalepeut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les art. 1792 et suivants du Code civil, doit être couverte par une assurance ». 
  2. b) Pour ces mêmes ouvrages, l’obligation pour un particulier (le maître d’ouvrage) de souscrire une assurance dommages-ouvrage est libellée à l’art.L.242-1 c.assu indiquant que :« Toute personne [..]qui agissant en qualité de propriétaire de l’ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l’ouvrage [..] fait réaliser destravaux de construction, doit souscrire avant l’ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs […] » (2). 

En cas de mise en vente d’un bien ayant fait l’objet de travaux décennaux encore garantis, le vendeur devra communiquer son contrat d’assurance dommages-ouvrage et la copie de l’assurance décennale du constructeur (3). 

2/ Le champ d’application de la garantie décennale

Qu’il s’agisse de l’assurance décennale souscrite par le maître d’oeuvre, ou de celle souscrite par le maître d’ouvrage, son champ d’application est identique. 

Il est posé par l’art.1792 c.civ indiquant que l’assurance décennale a pour objet de garantir de « plein droit », « envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage », « des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination » (4). 

L’art.1792-2 c.civ étend ce champ aux « dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un ouvrage, [..] lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert [..] ». 

Au sens de ces deux articles, l’assurance décennale est applicable : 

– de « plein droit », sans qu’il n’y ait lieu de rechercher la responsabilité de son souscripteur (ni celle du professionnel) lequel est présumé responsable par défaut ;

– Et a pour objet de garantir la réparation des dommages qui compromettent la « solidité de l’ouvrage » ou qui le rendent « impropre à sa destination » étant précisé qu’elle s’étend aux éléments d’équipement lorsqu’ils sont indissociables des ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert. 

3/ Les 3 garanties légales de construction et les autres cas d’indemnisation. 

L’assurance décennale est l’une des 3 garanties légales de construction (5) créée par la loi SPINETTA (6). 

Ces 3 garanties sont : 

1/ Pendant la 1ère année : la Garantie de « Parfait Achèvement » définie à l’art.1792-6 c.civ. Elle court dans le délai d’1 an suivant la réception de l’ouvrage, pour les désordres apparents ayant fait l’objet de réserve(s) dans le PV de réception, ou pour ceux apparus dans ce même délai et ayant fait l’objet d’une mise en demeure par LRAR. 

2/ Pendant les 2 premières années : la Garantie biennale de « Bon fonctionnement » posée par l’art.1792-3 c.civ (7). Elle garantit le bon fonctionnement des éléments dissociables de la construction pendant les 2 premières années suivant la réception des travaux. La mise en oeuvre de cette garantie doit faire l’objet d’une mise en demeure par LRAR. 

3/ Pendant 10 ans : La Garantie « Décennale » définie à l’art. 1792 c.civ. Il sera nécessaire de signaler les désordres à l’assureur dommages-ouvrage pour que la prise en charge soit immédiate (8). 

4/ Parallèlement à l’existence de ces 3 garanties légales, existe un 4ème cas d’indemnisation de création jurisprudentielle (9), fondé sur la notion de « Dommages intermédiaires ». 

Ce mécanisme créé par les juges, permet d’engager la responsabilité contractuelle du constructeur dans le cas où une faute de sa part serait démontrée, mais que le dommage ne présenterait pas le caractère de gravité requis par la garantie décennale dont le champ d’application est plutôt strict, ou bien, qu’il s’agirait seulement d’une mauvaise exécution sans désordre immédiat constaté. Ce cas d’indemnisation se prescrit par l’échéance des 10 ans à compter de la réception des travaux (10). 

5/ Un 5ème cas d’indemnisation existe également dès lors que le recours porte seulement sur un élément dissociable du bien. Il s’agit de l’action mobilière qui se prescrit par 5 ans à compter du jour ou son titulaire a connu, ou aurait dû connaître, les faits lui permettant de l’exercer (11). Le délai de 5 années court à compter de la découverte de la mauvaise exécution, il est applicable dans le délai décennal courant à compter de la réception des travaux (12). A l’échéance du délai décennal, l’action en responsabilité civile est forclose (13). 

6/ Enfin, un dernier cas d’indemnisation existe, il s’agit en droit des assurances de la prescription biennale (14) définie à l’article L. 114-1 du Code des assurances (15). 

En cas de mise en vente d’un bien ayant fait l’objet de travaux décennaux encore garantis, le vendeur devra communiquer son contrat d’assurance dommages-ouvrage ainsi que la copie de l’assurance décennale du constructeur (16). Faute d’y parvenir, il sera « présumé constructeur » (B). 

B/ Redoublez de vigilance lorsque le bien mis en vente a fait l’objet de travaux non assurés ou partiellement

  1. Le vendeur « présumé constructeur » est redevable de la garantie décennale

Il est relativement fréquent d’observer que les travaux de nature décennale ont été réalisés par le vendeur lui-même, par une connaissance, ou par un professionnel, et que l’absence d’assurance décennale est totale ou partielle. 

Dans ce genre de situation, le législateur intransigeant prévoit à l’art.1792-1 qu’est « réputé constructeur » toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu’elle a « construit » ou « fait construire ». Le vendeur « réputé constructeur » sera alors redevable de la garantie décennale citée à l’art. 1792 c.civ, mais également des autres cas d’indemnisation cités ci-dessus. Cette situation risquant d’épuiser sa capacité financière, ou en cas d’insolvabilité, de placer l’acquéreur dans une situation d’irréversibilité. 

(Précision faite que : la conséquence sera strictement identique que le défaut d’assurance soit total ou partiel, et que la clause d’exonération de la garantie des vices cachés ne sera d’aucun secours (17). L’absence partielle d’assurance étant « moins risquée » pour le vendeur, qui pourra toujours se retourner contre la décennale constructeur et/ou, par défaut, inviter l’acquéreur à le faire.

2/ Absence totale d’assurance : L’idée (non exonératoire) du dossier « travaux » exhaustif

La seule circonstance que des travaux ne soient pas assurés n’entraîne pas la nullité de la vente, d’ailleurs le bien n’est pas davantage exclu du marché immobilier. En revanche, l’acte de vente devra faire exactement mention de l’irrégularité et de ses incidences, de manière à ce sa délivrance corresponde exactement à ce qui a été défini au contrat (18). 

A savoir que contrairement au processus d’indemnisation quasi-automatique des compagnies d’assurance, le vendeur dont la responsabilité serait recherchée ne sera pas redevable « automatiquement » d’une somme d’argent. En ce sens que seul un juge pourra prononcer la saisie d’une somme d’argent sur son compte bancaire. 

Le contradictoire sera donc permis, même si l’issue restera véritablement incertaine pour lui

Constituer un dossier « travaux » et l’annexer à l’acte de vente présentera un double intérêt, à la fois pour le vendeur dont la défense judiciaire en sortira renforcée, mais également (et surtout) pour les conseillers tenus par un devoir de conseil et d’information. 

Ce dossier devra être aussi exhaustif que possible et pourra, notamment, rassembler : des factures travaux ; des preuves d’acquisition de matériaux permettant de déterminer la nature des travaux réalisés ; le dossier administratif (DP, permis, et surtout la DATC) ; un rapport d’expertise, ou un devis-travaux remis par un spécialiste du bâtiment sur les travaux réalisés, les malfaçons, le montant des reprises… 

Enfin, le contrat de vente devra faire mention de l’absence partielle ou totale d’assurance et surtout des incidences (Ex : risque d’insolvabilité) (19). 

Ces précautions étant bienvenues un risque juridique demeurera toujours. 

 

 1 – Créée par la loi n°78-12 du 4 janvier 1978, dite loi Spinetta relative à la responsabilité et à l’assurance dans le domaine de la construction, l’obligation de souscrire à ces assurances décennales figure sous le Chapitre II « Assurance de dommages obligatoire », du Titre IV « L’assurance des travaux construction », du Livre II « Assurance obligatoire », Partie législative, du Code des assurances. 

2 – Toute personne doit souscrire avant l’ouverture du chantier commandé, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance décennale qui aura pour effet de couvrir les travaux de nature décennale dont sont responsables les constructeurs. Cette assurance aura pour effet de rembourser immédiatement, ou d’exécuter immédiatement, des réparations couvertes par la garantie décennale sans qu’il n’y ait lieu de rechercher la responsabilité des intervenants. 

3 – Loi n°2015-990, dite loi Macron du 6 aout 2015, art.L241-1 c.assu.  

4 – Précision faite que seuls les travaux ayant fait l’objet d’une ouverture de chantier pendant la période de validité du contrat sont couverts par cette garantie. Il est donc impératif de souscrire une assurance dommage avant l’ouverture du chantier. Aucune régularisation postérieure ne sera possible. 

5 – Une garantie légale de construction est un mécanisme de responsabilité présumée du constructeur. Elle est d’application « automatique », c’est-à-dire qu’elle s’applique de plein droit sans qu’il n’y ait lieu de subordonner sa mise en oeuvre à la preuve d’une faute, ni à la recherche d’une responsabilité. Cela signifie que le constructeur sera présumé responsable des désordres apparus, à charge pour lui de démontrer qu’ils proviennent d’une cause étrangère. 

6 – La loi n°78-12 du 4 janvier 1978, dite loi Spinetta. 

7 – L’art.1792-3 du code civil indique « Les autres éléments d’équipement de l’ouvrage font l’objet d’une garantie de bon fonctionnement d’une durée minimale de deux ans à compter de sa réception ». 

8 – L’assurance dommages-ouvrage aura pour effet de rembourser immédiatement, ou d’exécuter immédiatement, des réparations couvertes par la garantie décennale sans qu’il n’y ait lieu de rechercher la responsabilité des intervenants. 

9 – Cour de Cassation.c.civ 3, du 10 juillet 1978, n°77-12.595 ;  

10 – Article.1792-4-3 du code civil ; 

11 – Article.2224 du code civil ; 

12 – Art.1792-4-3 du code civil ; 

13 – C.Cass.3èc.civ, 10/06/2021 n°20-16.837 ; 

14 – Lorsque vous constatez un dommage sur un ouvrage après la fin de la garantie décennale, il se peut que l’évènement à l’origine de ce désordre soit survenu dans les 10 ans de garantie légale et qu’il n’est pas été apparent, ou bien, que ce dommage constitue une aggravation de dommages survenus pendant la garantie décennale et ayant fait l’objet de travaux de réparation, ou encore qu’il s’agisse d’un désordre évolutif dénoncé pendant la garantie décennale. Ce désordre engage la responsabilité du constructeur, même si sa demande en garantie intervient après l’échéance du délai décennale, et ce, dans un délai de 2 ans à compter de l’évènement qui lui donne naissance (voir aussi : CA Grenoble, c.com, 25/03/21, n°18/03266). 

15 – L’article L. 114-1 du code des assurances indique que « Toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par 2 ans à compter de l’événement qui y donne naissance ». 

16 – La loi n°2015-990, dite loi Macron du 6 aout 2015, art.L241-1 code assurance. 

17 – La situation se complique davantage lorsque le vendeur à l’initiative des travaux, se retrouve dans l’incapacité de justifier de leur réception, ou même de la date exacte de leur achèvement En l’absence d’éléments justificatifs, le délai de 10 ans court à compter de la manifestation du désordre.  

18 – Article.1604 du code civil. 

19 – L’acquéreur ainsi informé et qui réitèrera l’opération de vente dans ces conditions sera censé avoir accepté le risque, puisque de jurisprudence courante « les conséquences d’un engagement librement souscrit et déclaré valable ne constituent pas un préjudice réparable ».  

 

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